Au Sénégal le taux de divorce a connu une augmentation significative, selon
une étude réalisée par l’Agence Nationale de la Statistique et de la
Démographie (ANSD). Depuis 2012, l’ANSD a récemment recensé 345
divorces, avec un taux de 96 049 de femmes, contre 30 236 d’hommes, et
ceci survient avant la cinquième année de mariage.
Les jeunes sénégalais sont les derniers à se marier en Afrique de l’Ouest,
depuis quelques années ils le font de plus en plus tard, entre 30 et 35 ans,
parfois même plus. De ce fait la question du mariage précoce ne se pose
plus mais on parle plutôt de divorce précoce fréquent des femmes selon
l’ANSD.
LE MARIAGE AU SENEGAL :
Au Sénégal, les règles relatives au mariage sont généralement basées sur
l’Islam, même si le Code de la famille est inspiré du droit français. Le
Sénégal est un pays laïc dont 95% de la population est musulmane. Le
mariage est une recommandation divine et une nécessité sociale pour la
femme car il est le seul chemin admis pour fonder une famille. Socialement
c’est par le mariage que la femme se valorise et accède à la « maturité »
puisque le mariage est le cadre légal et légitime des rapports sexuels.
La société sénégalaise n’accepte le célibat définitif des femmes et elle
impose à la femme de se soumettre à son conjoint homme, érigé par la règle
sociale comme chef de famille. acces
Pourquoi les femmes divorcent-elles de plus en plus ?
345 divorces depuis 2012 selon l’ ANSD.
Aujourd’hui le taux de scolarisation des femmes augmente et transforme le
marché de l’emploi. Avec la crise économique, les salaires diminuent, l’âge
du mariage recule, les femmes participent de plus en plus à la vie
économique. La dureté de la vie entraine une redéfinition des rôles des
hommes et des femmes au sein des couples. Parce que les femmes se
marient de plus en plus tard, le taux de fécondité diminue. Cependant, le
rôle des femmes dans la société semble s’être améliorée et la présence de la
femme s’impose dans tous les secteurs. Statistique
Face à cette situation comment évolue la formation et la dissolution des couples ?
À la rencontre d’une femme divorcée !
Dans une gargote à Pikine, habillée en jean bleu et t-shirt blanc, du rouge à
lèvres et maquillage posée sur un beau sourire, Fama Thiaw restauratrice
âgée de 34ans est une femme divorcée et mère de deux enfants, dont une
fille de 6ans et un garçon de 4ans. Elle profite de notre interview pour
partager son histoire en tant que femme divorcée mère et travailleuse.
« J’étais dans un mariage infernal, durant 7 sept bonnes années. J’avais 27
vingt-sept ans quand je me suis mariée. J’étais au Sénégal, je gagnais bien ma
vie, je travaillais ce que j’ai toujours eu en tête , je faisais tout ce qui était légal
pour prendre ma vie en main. Et un jour un ami m’a proposé un poste de
restauration en Guinée Équatoriale avec un bon salaire et comme tout mon
rêve était de travailler et subvenir à mes besoins ainsi qu’aux besoins de ma
famille, j’ai accepté. J’ai voyagé avec toutes mes économies dans le but de
travailler et gagner ma vie. J’ai fait deux ans là-bas et je m’en sortais
vraiment, j’avais une vie stable et je veillais aussi à l’instabilité de ma famille
au Sénégal.
Et un jour j’ai rencontré un Sénégalais par le biais d’une collègue au
restaurant, j’étais en train de discuter avec elle et elle m’a dit : « Les
Sénégalais sont de belles personnes, j’ai un ami sénégalais très gentil … Il faut
que je te le présente parce que depuis que tu es ici tu ne fréquentes personne.
Peut-être que c’est parce que tu ne vois pas ton frère ou sœur sénégalais ». J’ai
accepté parce que je me sentais vraiment seule et ne voyant pratiquement
jamais de Sénégalais sur place, j’avais hâte d’en rencontrer un. Ma collègue a
appelé le monsieur pour qu’il vienne manger au restaurant afin de nous
présenter, c’était un réel plaisir de voir un Sénégalais à mes côtés et on a
commencé à se voir de temps en temps.
Au fil du temps on est tombé amoureux et il m’a présenté sa famille au
Sénégal et j’ai aussi fait de même. Trois mois après il me demande en mariage,
j’ai accepté et c’est à partir de là que tous mes problèmes ont commencé.
C’était un beau parleur et on s’est marié très vite, d’autant plus que j’avais la
pression sociale mes parents qui me demandaient de me marier. Selon eux,
dans notre culture il me faut un mari plutôt que d’aller à l’étranger et vivre
seule en tant que femme célibataire. Il me fallait trouver un époux pour les
rassurer. Je me suis donc mariée d’abord par amour mais aussi pour mes
parents.
Mon mari vivait déjà depuis 20 ans en Guinée Équatoriale et il y a même été
emprisonné. Il avait perdu son travail, ne travaillait plus et m’avait bien caché
toutes ces informations. Moi-même je travaillais et n’attendais rien de
personne. Je gagnais bien ma vie et je continuais à prendre soin de moi. Après
le mariage il m’a proposer de venir vivre chez moi en me faisant croire que
c’était temporaire le temps que nous trouvions un appartement pour nous
installer tous les deux. On vivait ensemble chez moi jusqu’à la naissance de
notre première enfant bébé Diama.
J’ai découvert plus tard que mon époux était un ex prisonnier qui ne travaillait
plus, doublé d’un dealeur et drogué. Il voyageait tout le temps en prétextant
des séminaires et des missions qui ne rapportaient rien. Il n’a jamais donné la
dépense quotidienne, n’a jamais payé le loyer. Même le baptême de notre fille
était à mes frais. Côté obligation, j’étais l’homme et lui la femme dans cette
union, je gérais toutes les dépenses sans attendre rien de lui.
Le pire avec tout cela c’est qu’il était aussi violent et je ne pouvais plus le
supporter. J’étais d’accord sur le fait qu’il ne m’aidait pas financièrement, ma
fille ne manquait de rien vu que je travaillais, mais je disais non à la violence.
Il avait commencé à me frapper toutes les nuits il me forçait à coucher avec
lui il me taxait d’infidèle. Je ne voulais pas que ma famille sache ce que j’étais
en train de vivre en ce moment je travaillais dure avec mon enfant, et lui me
volait mon argent ou même m’agressait pour prendre tous ce que j’avais.
C’était vraiment très dur … ».
Fama Thiaw marque une pause et pleure puis reprend : « Et j’en pouvais
plus il me violait chaque nuit je n’avais pas où aller alors que je vivais dans ma
maison où je payais tout.
Avant ce mariage j’étais très belle et raffinée mais finalement je pouvais
même pas prendre de photo pour envoyer à ma famille au Sénégal et mes
collègues me demandaient tout le temps ce qui n’allait pas, si j’étais malade,
parce que j’étais méconnaissable.
Et c’est suite à ça que j’ai demandé le divorce et lui me répondait que nous
n’étions pas mariés pour divorcer et que j’allais continuer à être sa femme et à
travailler pour le nourrir et le satisfaire. J’ai insisté et l’ai menacé d’aller en
justice. Il m’a demandé alors de nous arranger entre nous et de trouver le
juste milieu comme nous sommes tous les deux Sénégalais vivant à l’étranger.
Il a donc décidé à partir de ce jour-là de prendre soin de moi ainsi que notre
fille. Il m’a donné de l’argent, a payé le loyer, les factures et tous. Il a géré les
dépenses pendant presque deux semaines tout en me parlant d’un avenir
meilleur. J’ai cru qu’il avait changé.
Un jour il m’a parlé d’un projet qu’il avait avec son frère et m’a invité à y
investir. Comme nous étions toujours mariés et qu’il se comportait
correctement, j’ai accepté de travailler avec lui. Et c’est par ce projet qu’il m’a
dépouillé de tout mon argent pour partir en Italie et à ce moment je portais la
grossesse de notre fils Papa Laye. Il a préparé tous ses papiers avant d’appeler
mes parents pour leurs dire qu’il est plus mon mari. On a divorcé pendant que
j’étais enceinte. Je n’avais plus d’argent. Il m’avait tout pris je n’avais même
plus les moyens de le poursuivre.
Après tout ce que j’ai traversé, j’ai fait une dépression et j’ai été licenciée.
J’étais devenue pauvre et une association m’a aidé pour que je puisse
retourner au Sénégal.
C’était très dure que j’arrive pas à vous raconter toute mon histoire mais c’est
vraiment mon vécu » finit Fama Thiaw des larmes sur les joues.
La vie de Fama après son divorce ?
« Ce n’était pas facile au début, toute ma famille et mon entourage me
disaient que mon mari m’a quitté parce que je lui avait été infidèle. Après ça,
je me suis renfermée, j’avais peur de tomber encore amoureuse. On me taxait
de femme facile ou de femme légère c’était vraiment une pression, une
stigmatisation. Mais j’ai toujours été une femme forte et une croyante, je dis
toujours Alhamdoulilah peu importe ce qui arrive.
J’ai continué à me battre, à travailler jusqu’à ce qu’avoir ma propre gargote
continué à gérer mes deux enfants et je suis pleinement heureuse avec mes
deux enfants. Vous m’avez vu sourire … Je suis très belle et responsable en
tant que divorcée et mère. Je gagne bien ma vie, je voyage partout dans le
pays pour cuisiner dans les séminaires, les cérémonies … et j’ai même crée des
emplois Alhamdoulilah ».
Pour moi le divorce a été une source de promotion sociale et économique.
Aujourd’hui je suis plus responsable sachant que mes deux enfants sont sous
ma responsabilité je me doit de travailler pour bien prendre soin d’elles en
plus je travailles comme je veux jours et nuits, je ne suis plus sous le contrôle
de personne je peux bien m’épanouir. »